dimanche, janvier 31, 2016

Un autre oiseau, du genre taquin

 Je n’étais pas revenu par ici depuis bien longtemps. Je parlais des livres pour affûter ma plume. J’avais l’espoir fou qu’un jour d’autres plumes parleraient de mes livres.

Depuis, je n’ai guère raturé que quelques pages ici ou là. Rien de bien glorieux et j’avais oublié un peut mes aspirations d’écriture. Je n’ai guère plus de mémoire qu’un moineau. Et le propre des choses que l’on oublie, c’est de ne pas s’en souvenir. Sans compter que dans notre nid, nous vivons à l’étroit maintenant. Il a fallu faire de la place pour un petit oisillon. Un oisillon qui occupe l’essentiel de mes heures.

L’oisillon dort et rêve. J’en profite pour reprendre la plume pour parler à nouveau d’un livre. Bien souvent, je classe les romans en fonction du plaisir que j’ai éprouvé à les lire. Je leur colle entre une et cinq étoiles puis je les range dans l’oubli poussiéreux de ma bibliothèque. La plupart des livres restent bien sages sur leurs étagères dans l’attente de trouver un nouveau lecteur. Il est d’autres gentils fantômes qui s’échappent de leur rayonnage pour continuer à me hanter.
Je suis revenu pour vous parler de l’un de ces ouvrages. Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur de Harper Lee mérite les lauriers que lui a tressé la postérité. Attention, chef d’œuvre !

Les livres qui me font rêver se répartissent eu deux grandes catégories. Ceux qui m’ont passionné pendant la lecture. Dans ces cas là, je brûle de savoir ce qu’il va arriver aux protagonistes, de résoudre les mystères, de découvrir de nouveaux horizons, d’apprendre des choses. Bref, j’aime ces livres car le récit me capture.

Et puis il y a ces autres romans, ceux qui persistent une fois la dernière page tournée. Ces livres là nous font réfléchir, ou bien ces univers ou ces personnages continuent de vivre dans nos têtes. Bref, j’aime ces livres car le récit ne nous libère pas.

Bien souvent, les bons livres combinent ces deux caractéristiques à des degrés divers. Je viens de terminer le chef d’œuvre de Harper Lee et je le range avec tendresse dans la deuxième catégorie. Tout comme Sur la route De Kerouac, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur ne brille pas par son intrigue. C’est une histoire douloureuse de haine et d’injustice. Dans les Etats-Unis d’Amérique, les hommes ne naissent pas toujours libres et égaux. Certains états du sud n’ont visiblement pas saisi que la guerre de sécession leur avait donné tort. Bref, le récit est prenant, fort. Il laisse des marques, des séquelles.
Mais je persiste, l’intrigue contribue au récit mais je ne pense pas que ce soit la première qualité du livre. A moins de d’avoir vécu toute sa vie au milieu des lamas, on sait qu’avoir la peau noire n’aide pas à s’épanouir le long du Mississipi.

Non, j’ai donné cinq étoiles à ce superbe livre à cause d’une nostalgie contagieuse. Je m’y suis plongé pendant quelques centaines de pages et j’ai désormais l’impression de connaître intimement la vie dans les petites villes du sud des Etats-Unis. Comme si j’y avais vécu ma propre enfance. J’ai l’impression de connaître Jem et Scout Finch. Et je me surprends parfois à souhaiter à avoir de leurs nouvelles.

C’est un récit universel qui parle avant tout de la fin de l’enfance. Confrontée au monde des adultes la jeune Marie-Louise ‘Scout’ Finch n’a pas encore les clefs pour comprendre la société dans laquelle elle vit.

La jeune narratrice découvre le monde avec un regard d’enfant. Ce garçon manqué n’est pas la petite ‘dame’ que la bonne société voudrait qu’elle devienne. Elle est effrontée, bagarreuse, terriblement intelligente. Parfois, on se perd un peu face au personnage qui nous raconte ses histoires. Est-ce qu’il s’agit d’une petite fille qui commence l’école, ou est-ce la narratrice devenue adulte qui se rappelle de ses jeunes années.

Il y a Jeremy ‘Jem’ Finch. Le grand frère qui sait tout et qui protège. Lui commence à s’éloigner de l’enfance. Il regarde le monde de l’autre côté du rideau de pluie de l’innocence.
Les deux enfants sont élevés par Atticus Finch, cet avocat qu’aucun des deux enfants n’ose appeler papa. La figure paternelle est l’un des notables de la petite ville de Maycomb, Alabama. Il est avocat et s’efforce d’élever seul ses enfant en leur montrant ce qui est juste. Son humanisme flamboyant se révèle le jour ou il est commis d’office pour défendre un noir accusé d’avoir violé une blanche.

Et puis il y a tous ces personnages qu’on aurait tort de considérer comme secondaire. Dill, l’amoureux fantasque de Scout qui revient tous les étés passer les vacances à Maycomb. Il y a le mystérieux Boo Radley qui n’est plus sorti de sa maison depuis des années, la terrible Mme Dubose, et tellement d’autres.
Ils ne sont ni gentils, ni méchants mais avant tout humains et donnent une véritable vie au roman.

Tout a été écrit sur ce roman, il est grand temps de refermer cette chronique.
Cela faisait quelques années que je n’avais attribué cinq étoiles à un livre, mais ma voix n’a pas beaucoup de force. Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur est devenu un classique récompensé par le prix Pulitzer, hissant Harper Lee au milieu des plus grands écrivains américains comme Faulkner, Hemingway ou Normal Mailer.

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