lundi, août 04, 2008

Un oiseau rattrapé par les Bienveillantes

Qu'ai je donc fait pour mériter un tel châtiment. Il semblerait que les furies grecques, ou autrement dit les Bienveillantes aient décidé de me jouer un sale tour. En effet, lire ou subir l'ouvrage éponyme de Jonathan Litell tient de la punition divine.

Imaginez vous ça, un livre tellement dense que l'on pourrait le recycler en briques pour construire une maison. Près de mille cinq cents pages d'un texte, lourd ou l'auteur ne nous épargne aucune récréation. Le retour à la ligne est rare pour ne pas dire inespéré, y compris durant les dialogues ce qui donne aux pages un aspect chargé et monotone. L'écriture est petite, je pense que quiconque achèterais ses livres au nombre de caractères serait gagnant, quand à les lire toutes ces phrases c'est autre chose. Ainsi, l'auteur ne se donne pas la peine de traduire de nombreuses expressions ou termes allemande, on trouve même des citations grecques ou latines. Ainsi, l'action se déroulant pendant la guerre en allemagne, on a systématiquement droit à la désignation des grades dans leur langue d'origine. C'est vrai, parler d'un major, d'un colonel ou d'un simple officier eut été trop simple, on perd le charme d'un Obersturmbannführer ou d'un Hauptfelwebel. Ce livre m'a immédiatement rappelé le profond dégoût que j'ai pour les langues germaniques (alors que j'ai eu le malheur de les pratiquer pendant plusieurs années).

Mais somme toute, ce n'est pas le plus la forme qui m'a choqué dans ce livre. C'est le fond qui est véritablement répugnant.
Donc nous suivons pendant ces quelques milles cinq cent pages (ce qui a représenté près d'un mois de lecture pour moi) les aventure d'un jeune officier SS durant la seconde guerre mondiale. Et pas un gentil SS, mais l'un de ceux qui ont activement participé à l'extermination des juifs. Ainsi on le suit au début du livre qui suit le front de l'est pour massacrer les partisan communistes, les malades mentaux et surtout les juifs par milliers. Puis on le regarde abandonner ses derniers restes de raison en organisant le travail dans les camps de concentration polonais.
Pour être exact, le roman retrace avec plus ou moins de talent quatre intrigue distinctes, la vie au jour le jour de notre protagoniste et sa progression dans l'échelle sociale militaire, la progression et l'origine de son déséquilibre mental causé par un amour exclusif et incestueux pour sa soeur, une sombre affaire criminelle lié à un passage en France où le narrateur retrouve ses parents et bien sûr la quatrième histoire est celle qui s'affuble d'un grand H comme pour revendiquer ses atrocités.

Notre héro est tout sauf sympathique. Ce n'est pas vraiment un boucher, mais il perçoit la Shoah comme une nécessité et s'acquitte de ses ordres avec une froideur inquiétante. Seul son organisme le trahit parfois par des troubles gastriques. Il apparaît régulièrement comme un pleurnichard qui s'apitoie sur son sort et son amour perdu pour sa soeur en se réfugiant derrière une sexualité soumise et sans amour pour les hommes qui frôle dangereusement à la pédérastie. Ses névroses le rattrapent peu à peu et il s'enferme dans des rêveries absurdes, fantasmagoriques et quasiment impossible à suivre, il projette sa philosophie fétide dans des tirades à la limite du supportable. C'est à peine si le dernier tiers du livre est lisible. Et son comportement à la fin devient proprement irrationnel et grotesque.

Donc ce livre est long, difficile à lire et très dur. Même si un éclat admirable de travail transparaît pour restituer l'horreur de cette période je regrette un peu mon achat. Sans compter que cela commence à faire beaucoup de livre que je lit qui ressasse le sort des juifs entre un secret, le complot contre l'Amérique et celui là, la coupe est pleine.

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